Communiqué de presse

Lawyer Victim Assistance (LVA) : évaluation du projet pour une meilleure prise en charge des victimes de violences sexuelles et intrafamiliales

Le projet pilote « Lawyer victime Assistance » (LVA) a été lancé en novembre dernier. Il est le fruit d’une collaboration entre le barreau, le parquet de Bruxelles, la zone de police Bruxelles CAPITALE Ixelles, l’IEFH et est soutenu par le ministre de la Justice Paul Van Tigchelt et la Secrétaire d’Etat à l’Egalité des genres, Marie-Colline Leroy.

Concrètement, ce projet a pour objectif de rendre plus accessible l’assistance juridique aux victimes de violences sexuelles et intrafamiliales et de mieux informer les victimes de leurs droits.

S’inscrivant dans la dynamique de la loi Stop féminicide, le projet comprend plusieurs volets dont :

  • La formation et la constitution d’un pool permanent d’avocats spécialisés dans l’assistance aux victimes et formés dans la prévention des féminicides. Ces formations sont organisées en collaboration avec les acteurs de terrain (associations, cellule EVA, CPVS, IEFH…) ;
  • Une première consultation gratuite d’un avocat pour les victimes ;
  • Une information par la police via affiches et formulaires distribués par les policiers de terrain informant des démarches à effectuer pour bénéficier d’une consultation juridique dans une situation des violences sexuelles ou intrafamiliales.  

 

La formation d’un pool d’avocats spécialisés dans les violences intrafamiliales :

Dans le cadre du projet LVA, un cycle de formation, en français, et en néerlandais, est actuellement organisé en vue de disposer, à Bruxelles, d’un pool permanent d’avocats spécialisés dans les violences intrafamiliales.

Concrètement, le barreau organise deux formations multidisciplinaires à destination des avocats, l’une en français, l’autre en néerlandais. Les formations se déroulent sur 4 journées complètes.

  • La formation en français (la 4ème du genre) a été organisée les 12,13, 26 janvier et 2 février 2024. Elle accueille 33 participants.
  • La formation en néerlandais sera organisée les 23,24 février et 1er et 8 mars 2024. Les inscriptions sont ouvertes.

Les thématiques abordées sont particulièrement larges et se complètent. Ainsi, sont notamment présentés les aspects essentiels de droit (Convention d’Istanbul, Code pénal sexuel, etc.), la manière dont les violences sont appréhendées au niveau de la procédure judiciaire et pénale, l’impact psychologique des violences, la prise en charge des victimes... La formation offre aussi des rappels concernant les réflexes de base nécessaires de la part des avocats lorsqu’ils sont confrontés à un dossier de violences sexuelles et/ou intrafamiliale, et ce, tant pour les aspects de droit de la famille que de droit du travail, de droit social et de droit des étrangers. La formation aborde également deux thématiques qui demeurent encore actuellement assez peu traitées : d’une part, la justice restauratrice et, d’autre part, la sensibilisation et la responsabilisation des auteurs de violences conjugales et sexuelles

 

Par ailleurs, une attention particulière est accordée à l’intersectionnalité et aux questions de droit civil et pénal (par exemple, le divorce, la garde des enfants, la coparentalité, les conséquences financières et économiques, les conséquences du dépôt d’une plainte et/ou (la nécessité) de mesures de protection telles que le placement extrafamilial, etc.) ainsi qu’aux femmes issues de l’immigration et aux autres personnes vulnérables.

Les thématiques sont abordées de manière multidisciplinaire, ce qui est indispensable compte tenu du sujet traité. En effet, même si les personnes qui assurent les formations sont en grande majorité des avocats et avocates, une partie des formations est dispensée par une criminologue, une assistance sociale, une infirmière légistique, etc. Le programme de formation met en avant les retours de terrain et l’expertise des dispositifs d’aide aux victimes, tels que les cellules EVA et les CPVS, mais également du secteur associatif.

Autrement dit, le projet n’est pas construit en vase clos : il permet aux avocats et avocates d’enrichir leur connaissance juridique des réalités vécues par d’autres acteurs et actrices de terrain.

 

Une première consultation gratuite pour les victimes :

Dans le cadre du projet et grâce à l’engagement du barreau, lorsqu’une victime est amenée à solliciter une assistance juridique d’avocats formés dans le cadre du projet-pilote, la première consultation est gratuite.

Cette disposition vise à renforcer l’accessibilité de la procédure et, dès lors, à lever une entrave financière ce qui peut contribuer à briser le silence des victimes et les aider à faire le premier pas dans une procédure.

Ces permanences juridiques gratuites ont débuté le 13 novembre 2023 pour une période test de six mois.

 

Un partenariat avec la police pour informer les victimes :

Un dépliant informant les victimes de violences intrafamiliales de la possibilité de consulter gratuitement un avocat du pool et des coordonnées de la permanence juridique est distribué par les policiers de la zone de Bruxelles Capitale Ixelles depuis novembre. ( 0478/115488 – LVA@barreaudebruxelles.be) Des affiches ont également été placées dans les commissariats.

L'attention de la victime est attirée sur la possibilité de demander une première consultation juridique gratuite, indépendamment de toute plainte ou action en justice.

 

Mise en place et première évaluation du projet :

Près de 100 avocats ont déjà été formés spécifiquement afin d’assister les victimes de manière appropriée et qualitative. 40 d’entre eux ont accepté de participer au projet pilote et de donner des consultations juridiques gratuites.

Grâce à cela, un agenda a été établi selon lequel 4 à 5 avocats sont de permanence par semaine pour assister les victimes. Une fois la demande transmise, l’avocat recontacte la victime dans les 48 heures et la reçoit dans les 8 jours.

 

Au 30 janvier 2024, une dizaine de demandes traitées et fiches d’intervention des avocats révèlent la pertinence du dispositif. Les victimes ont accueilli très positivement le dispositif et se sont dit soulagées de savoir qu’elles pouvaient directement accéder à un avocat sans devoir accomplir les démarches de recherche d’un avocat spécialisé et autres formalités.

Sur la base du retour des services de police, il a été proposé, pour améliorer la communication et la prise de connaissance du projet d’assistance juridique, de diffuser des supports d’information aux associations de prise en charge des victimes de violences sexuelles et intrafamiliales. Avec l’accord du parquet de Bruxelles, des démarches sont entreprises en ce sens auprès de 18 associations bruxelloises.

Des partenaires comme le CPVS de Bruxelles et SOS VIOL ont expressément indiqué leur grande satisfaction de voir cette offre de consultations juridiques exister.

 

Perspectives du projet :

Le projet-pilote bruxellois sera mené jusqu’à la mi-mai 2024. Les formations organisées et la collaboration avec la police vont durablement améliorer l’accompagnement des victimes de violences intrafamiliales à Bruxelles. A l’issue de la période test, les partenaires envisageront de poursuivre les dispositifs initiés.

Sur le modèle du projet bruxellois, le gouvernement fédéral envisage de soutenir prochainement des projets similaires en Flandre et en Wallonie.

Une évaluation externe et les enseignements généraux liés à ces projets pilotes pourront servir de support aux différents barreaux de Belgique dont plusieurs ont déjà marqué leur intérêt pour la démarche.

Pour la Secrétaire d’Etat à l’Egalité des genres, Marie-Colline Leroy : « Chaque victime de violence sexuelle et intrafamiliale est une victime de trop. Le projet « Lawyer Victim Assistance » s’inscrit pleinement dans la volonté du Gouvernement fédéral d’adopter une stratégie coordonnée face aux violences intrafamiliales et sexuelles et en pleine cohérence avec la loi stop féminicide. La formation d’avocats spécialisés et la collaboration avec la société civile permet à l’expertise de progresser. Aider à briser le silence, à libérer la parole, c’est nécessaire pour faire reculer les violences et l’impunité des auteurs et cela se construit à travers l’amélioration de l’accompagnement des victimes à tous les maillons de la chaine. Les premiers résultats du projet pilote bruxellois sont encourageants et offrent une nouvelle perspective de renforcement des politiques déjà menées contre les violences de genre. »

 

Paul Van Tigchelt, ministre de la Justice : « Chaque année, 50 000 actes de violence intrafamiliale sont enregistrés. Ce chiffre est très inquiétant et pourrait même être sous-estimé. De plus, en moyenne, les victimes ne commencent à porter plainte qu'après 35 actes. À ce moment-là, une victime peut avoir déjà été menacée, battue ou violée 35 fois. C'est un chiffre effrayant. Nous devons tout faire pour abaisser au maximum les seuils afin que les victimes cherchent immédiatement de l'aide. Cette initiative y contribue, grâce à des avocats spécialisés qui mettent leurs services à disposition gratuitement. Notre message aux victimes est clair : la justice vous prend au sérieux et fera tout son possible pour vous aider. »

 

Les bâtonniers du barreau de Bruxelles, Emmanuel Plasschaert et Bernard Derveaux sont conscients de l’importance pour les victimes d’accéder rapidement à une information juridique de qualité auprès d’avocats formés, et convaincus de l’importance pour les avocats de travailler en collaboration avec tous les acteurs de la prise en charge des victimes (magistrats du parquet, policiers, psychologues, assistants sociaux, accompagnateurs). Le barreau se veut partenaire de la lutte menée contre les violences sexuelles et intrafamiliales.